mardi 5 mars 2013

LES DEUX BABYLONES





LE SOUVERAIN PONTIFE - ORDRES RELIGIEUX ( histoire)


Le don du ministère est l'un des plus grands que Christ ait fait au monde. C'est à ce sujet que le Psalmiste, prophétisant l'ascension du Christ, parle dans ce langage élevé, de ses glorieux résultats : Tu es monté en haut, tu as emmené des captifs en captivité ; tu as reçu des dons pour les hommes, même pour les rebelles, afin que l’Éternel demeurât parmi eux." Ps. LXVIII. 19. L'Église de Rome, à son origine, possédait le don céleste du ministère et du gouvernement scripturaire; " sa foi était alors célèbre dans le monde entier," ses oeuvres de justice étaient riches et abondantes. Mais dans un jour de malheur, l'élément Babylonien s'introduisit dans son ministère, et désormais ce qui devait être une bénédiction devint une malédiction. Depuis ce moment, au lieu de sanctifier l'homme, elle n'a servi qu'à le démoraliser, et à faire de lui " deux fois plus l'enfant de l'enfer," qu'il ne l'aurait jamais été si elle l'eût simplement laissé à lui-même.


S'il en est qui s'imaginent qu'il y a une vertu secrète et mystérieuse dans une succession apostolique venant par la papauté, qu'ils considèrent sérieusement le caractère réel des ordres du pape et de ceux de ses évêques et de son clergé. Depuis le pape jusqu'au moindre membre du clergé, tout, on peut le montrer, est entièrement Babylonien. Le collège de cardinaux avec le pape en tête est exactement la contrepartie du collège païen des pontifes avec son " Pontifex Maximus " ou le Souverain-Pontife qui avait existé à Rome depuis les temps les plus reculés, et qui, on le sait, était formé sur le modèle du grand concile de pontifes de Babylone. Le pape prétend aujourd'hui à la suprématie dans l'Eglise comme successeur de saint Pierre, auquel, dit-on, Notre-Seigneur a exclusivement confié les clefs  du royaume des cieux. Mais voici un point important : avant que le pape ne fût investi de ce titre qui, pendant mille ans, avait désigné le pouvoir des clefs de Janus et de Cybèlle1, aucune prétention à cette prééminence ou à quoi que ce soit de semblable ne fut proclamé, sous prétexte qu'il était le possesseur des clefs remises à Pierre.


Les évêques de Rome, il est vrai, montrèrent de bonne heure un esprit fier et ambitieux ; mais pendant les trois premiers siècles leurs prétentions à des honneurs particuliers se fondaient simplement sur la dignité de leur siège, qui était celui de la ville impériale, la capitale du monde Romain.
Cependant quand le siège de l'empire fut transporté en Orient, et que Constantinople menaça d'éclipser Rome, il fallut bien chercher de nouvelles raisons pour maintenir la dignité de l'évêque de Rome. Ces raisons on les trouva, lorsque vers 378, le pape devint héritier des clefs qui étaient les symboles des deux divinités païennes bien connues à Rome.
Janus avait une clef 2, Cybèlle avait aussi une clef 3 et ce sont là les deux clefs que le pape porte dans ses armes comme emblème de son autorité spirituelle.
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      * 1 C'est seulement au IIe siècle avant l'ère chrétienne que le culte de Cybèlle sous ce nom fut introduit à Rome, mais la mère déesse sous le nom de Cardea, avec le pouvoir de la clef, était adorée en même temps que Janus, depuis bien longtemps. Ovide, Fastes, vol.iii, v.102. p.346.
          2. Ibid. lib. I, v. 95 , 99, vol.iii, p. 18.
          3. Tooke, le Penthéon, Cebèlle, p. 153.


Comment le pape en vint-il à être considéré comme jouissant du pouvoir de ces clefs ? on le verra plus loin ; mais il est certain qu'à l'époque dont nous parlons l'opinion populaire lui attribua ce pouvoir. Lorsque, aux yeux des païens, il eût occupé la place des représentants de Cybèlle et de Janus, et qu'il eût le droit de porter leurs clefs, le pape vit que s'il pouvait faire seulement croire aux chrétiens que Pierre seul avait le pouvoir des clefs et qu'il était le successeur de Pierre, la vue de ces clefs entretiendrait l'illusion, et que si la dignité temporelle de Rome en tant que cité venait à baisser, sa dignité personnelle d'évêque de Rome serait plus solidement établie que jamais. C'est évidemment de cette façon qu'il a procédé.Un certain temps s'écoula, et alors quand le travail secret du mystère d'iniquité eût préparé le terrain, le pape affirma pour la première fois sa suprématie, fondée sur les clefs données à Pierre. Vers 378 il s'éleva à la position que lui donnait aux yeux des païens le pouvoir de ces clefs. Ce fut en 431, et non point auparavant, qu'il prétendit ouvertement à la possession des clefs de saint Pierre 1. Il y a là évidemment une coïncidence frappante. Le lecteur demandera-t-il comment on pouvait croire à une prétention si peu fondée ? Les paroles de l'Ecriture sur ce même sujet, donnent une réponse claire et satisfaisante : 2 Thess. 2 : 10 , 11. " Parce qu'ils n'ont pas reçu l'amour de la vérité pour être sauvés... C'est pourquoi Dieu leur enverra un esprit d'erreur, en sorte qu'ils croiront au mensonge." Il y a peu de mensonges aussi grossiers ; mais avec le temps, ce mensonge fut pourtant cru, et de même qu'on adore aujourd'hui la statue de Jupiter avec la conviction que c'est la vraie statue de Pierre, ainsi on a dévotement cru pendant des siècles que les clefs de Janus et de Cybèlle représentaient les clefs du même apôtre.
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     * 1. Si l'on veut avoir la preuve que cette prétention fut élevée pour la première fois en 431, qu'on lise Elliott, Horx, vol. III, p. 139. En 429, il y fut fait une première allusion, mais ce n'est qu'en 431 que cette prétention fut ouvertement et clairement formulée.

Les Clefs


L'infatuation seule a pu faire croire aux chrétiens que ces clefs étaient l'emblème d'un pouvoir exclusivement donné par Christ au pape par le moyen de Pierre ; mais il est facile de voir comment les païens devaient se rallier autour du pape avec empressement quand ils l'entendraient fonder son pouvoir sur la possession des clefs de Pierre. Les clefs que portait le pape étaient les clefs d'un Pierre bien connu des païens initiés aux mystères Chaldéens. Que Pierre ait jamais été évêque de Rome, c'est là, on l'a prouvé bien des fois, une fable grossière. Il est même fort douteux qu'il ait jamais mis les pieds à Rome. Sa visite à cette ville n'est fondée sur aucune autorité sérieuse. Seul, un écrivain de la fin du deuxième siècle ou du commencement de la troisième, l'auteur de l'ouvrage appelé les Clémentines 1, nous dit gravement qu'à l'occasion de cette visite, ayant trouvé là Simon le magicien, l'apôtre le défia de lui donner une preuve de son pouvoir miraculeux ou magique, sur quoi le sorcier s'envola dans les airs, et Pierre le fit descendre avec une telle hâte qu'il se cassa une jambe 2. Tous les historiens sérieux ont rejeté bien vite l'histoire de cette rencontre de l'apôtre et du magicien comme manquant absolument de preuves contemporaines ; mais comme la visite de Pierre à Rome est fondée sur la même autorité, elle demeure ou tombe avec elle ; du moins, on ne doit l'admettre que comme extrêmement douteuse. Mais si tel est le cas pour le Pierre du christianisme, il est facile de prouver d'une manière indubitable qu'avant l'ère chrétienne il y avait à Rome un Pierre qui occupait la plus haute place dans la prêtrise païenne.
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      * 1.Gieseler, vol. I, p. 206 - 208.
         2. Voir Bower, vol. I, p. 212.
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